
Face To Face avec le rappeur mexicain El Pinche Mara

Pour sa première visite en Amérique latine, notre série Face to Face démarre sur les chapeaux de roue avec une interview du rappeur mexicain El Pinche Mara. Aussi vif que bavard, El Mara est un personnage à part entière de la scène hip-hop mexicaine. Il nous parle de sa carrière bien remplie et de son prochain album, Bajo Penumbra.
Pour les amateurs de hip-hop mexicains - et ils sont nombreux, si l'on en croit un rapport de Spotify de 2023 indiquant que le Mexique est leur deuxième marché pour les streams hip-hop1 - El Pinche Mara est loin d'être un inconnu. Non seulement il est sur le circuit depuis plus de 10 ans, mais il a également mis la ville de Mérida, dans le Yucatan, sur la carte du hip-hop mexicain.
Pourtant, la musique n'était pas un pari gagné d'avance pour celui qui, enfant, a fait partie d'un gang de rue et a passé du temps dans des centres de détention pour mineurs. La mort tragique de son frère l'a incité à changer de vie et à se consacrer entièrement à son art. En 2014, il sort alors El Relato De Mi Vida, un album qui aura un impact majeur sur le public rap mexicain.
Depuis cet album, et bien qu’il se soit apaisé, El Pinche Mara - ou simplement El Mara - n’a jamais cessé de sortir des nouveaux projets, montrant sa facilité à s’adapter aux différents styles hip-hop actuels – du boom-bap au trap – tout en restant fidèle à son univers, et à une fanbase grandissante.
Avant la sortie de son nouvel album, Bajo Penumbra (Sous la pénombre), El Mara s'est rendu à Mexico D.F. et Ali Masare, A&R Manager Artist Services chez Believe Mexico, a saisi l'occasion de le rencontrer pour discuter de son nouvel album, mais aussi de la façon dont il a utilisé YouTube pour développer sa carrière et de comment la musique lui a sauvé la vie.
Ali Masare : Quoi de neuf, Mara ? Comment vas-tu ? C'est un plaisir de te rencontrer aujourd'hui. Tu te sens bien ?
El Mara : Merci. Je vais bien, mon pote. Je me sens bien.
Ali Masare : Comment la ville de Mexico te traite-t-elle ?
El Mara : Bien, mec ! Merci. Tout va bien pour toi ?
Ali Masare : Oui, super ! On sait que tu es l'un des artistes les plus reconnus de la scène hip-hop au Mexique. Mais j'aimerais que les gens qui nous voient dans d'autres parties du monde sachent qui est El Mara, d'où vient El Mara ?
El Mara : Eh bien... El Mara est Maya. Je suis originaire de Mérida, Yucatan, au sud du Mexique, du sud de Mérida aussi. Je viens d'un quartier populaire qui s'appelle San José Tecoh. Et quoi d'autre ? J'ai grandi dans les rues, j'ai grandi avec les gangs, sans rien d'autre que beaucoup de rêves.
Ali Masare : Est-ce que tu as l'impression qu'à un moment donné, c'est grâce à la musique que tu es sorti des gangs, de la rue, que la musique a été la porte de sortie ?
El Mara : Je pense que la musique m'a sauvé, m'a évité d'être tué ou de tuer quelqu'un. Elle m'a évité d'être handicapé ou d'être en prison pour toujours. Elle m'a vraiment sauvé.
Je pense que la musique m'a sauvé, m'a évité d'être tué ou de tuer quelqu'un. Elle m'a évité d'être handicapé ou d'être en prison pour toujours. Elle m'a vraiment sauvé.
Quand j'étais en prison, j'ai rencontré un manager qui m'a fait confiance. Il m'a emmené à Guadalajara, et après avoir vu la mort de mon frère, je me suis retrouvé là... vous savez, au milieu du danger. Être au pire de ce qu'on peut vivre. Et puis on voit qu'il y a une autre vie, qu'il y a la foi, qu'avec de l'argent on peut aller ailleurs...
Ali Masare : Comment s'est déroulée la conception de ton premier album El Relato de Mi Vida ? Peux-tu expliquer ce qu'il contient, pour les personnes qui ne l'ont pas encore écouté et qui aimeraient le faire ?
El Mara : Eh bien, El Relato de Mi Vida, je l'ai écrit parce que... Ecoute, j'étais dans des gangs. J'ai fait de sales coups et les gens m'ont fait de sales coups. Un jour, quand j'avais environ 16 ans, mon père est venu me voir et il m'a dit : "Fiston, tu as l'air d'avoir 26 ans". La rue était en train de me tuer. C'est ce que j'ai mis dans El Relato de Mi Vida.
J'avais à peine 17 ans, mais je vivais comme si j'en avais 27. Je me disais que j'allais trop vite, que je vivais trop vite. Mais je me sentais impliqué, car j'avais beaucoup de gens qui me suivaient. Et El Pinche Mara doit être El Pinche Mara man.... Sinon, ce n'est pas El Mara. D'une certaine manière, je faisais le mauvais choix, j'ai fini en prison.
Je ne juge pas les personnes qui ont fait des erreurs. Je pense que c'est une bonne chose que quelqu'un apprenne de ses erreurs. Ce qui est bien avec les étapes de la vie, quand on y pense, c'est qu'on y arrive et qu'on en sort, non ? Par exemple, lorsque tu es dans un processus physique, tu peux te dire "je veux juste me reconstruire". Il faut apprécier le processus, où que vous en soyez dans votre vie.
Ali Masare : Je pense que ta chaîne YouTube a été l'un de tes principaux outils. Que pense- tu du fait de disposer d'un espace comme une chaîne YouTube ? Ce n'était évidemment pas possible il y a 15 ou 20 ans, lorsqu'il fallait regarder la télévision pour voir des clips musicaux. Comment penses-tu que ce genre d'outil t'a aidé ?
El Mara : Je pense que YouTube est un outil qui permet de découvrir de nombreux artistes que l'on ne pouvait pas connaître auparavant. Des artistes que l'on ne voyait pas à la télévision et qui n'allaient donc pas percer.
Ali Masare: C'est vrai, on ne pouvait pas imaginer voir El Mara à la télévision en 2014.
El Mara: Exactement, ça n'allait jamais arriver. Je pense donc que YouTube est une fenêtre d'opportunités pour les gens qui ont du talent, et que YouTube peut nous donner l'occasion de faire notre propre truc. Et plus que tout, c'est une nouvelle façon de s'exprimer. Avant nous, les Mayas ont commencé par des dessins. Et avec YouTube, nous pouvons aussi exprimer nos propres sentiments.
Ali Masare: Que penses-tu du fait de travailler avec l'équipe de Believe Artist Services ? Penses-tu qu'ils apportent quelque chose à ton équipe, en plus de ton management ou de ton label ? De quelle façon penses-tu que Believe AS t'a soutenu ?
El Mara: Je pense que c'est ce que tu disais à propos des outils. Je veux dire que maintenant je me sens vraiment comme un soldat équipé d'un gilet pare-balles, avec tous les outils et le soutien. Avoir une armure est essentiel en toute chose, c'est certain.
Je pense également qu'il est nécessaire d'avoir une équipe. Il appartient à l'artiste et à l'équipe de comprendre que nous sommes tous dans le même bateau. Qu'on a tous ce lien, qu'on est tous dans le même bateau et qu'on va aller loin ensemble. Qu'il doit y avoir une bonne organisation pour qu'il n'y ait pas de malentendus. Je pense que c'est une bonne chose.
Depuis que je travaille avec Believe, la vérité est que tout s'est amélioré. Nous nous comprenons bien. J'ai compris des choses que je ne comprenais pas auparavant.
Je pense que c'est l'un des moments où un artiste peut se dire "je comprends pourquoi ils ont fait ça". Il peut sentir le soutien et c'est ce qui le motive à continuer, à se dire "allons-y avec cette équipe".
C'est ce que je me suis dit : "Ces gars-là veulent travailler, et ils veulent aller loin". Et je me sens bien, je me sens confiant, je me sens plus libre de faire des choses, tu vois ?
Ali Masare : Oui, tout à fait ! Tu es très populaire ici, au Mexique, mais te verrais-tu en dehors du Mexique, jouer dans d'autres parties du monde ? Ou collaborer avec d'autres artistes du monde entier ?
El Mara : Oui, je pense que beaucoup de gens attendent ça de moi, des collaborations avec de nombreuses personnes, je veux dire. J'aimerais aller à Los Angeles et rencontrer des gens là-bas, en Colombie aussi. Nous avons des contacts en Colombie, nous devons y aller, nous ne l'avons pas encore fait. Mais oui, je me vois bien faire cela.
Je veux mettre en place un projet pour faire de grandes choses comme ça... Des choses qui peuvent nous amener à un plus haut niveau.
Ali Masare : C'est génial ! Tu sais déjà que ton équipe Believe AS sera à tes côtés pour te soutenir tout au long de ta carrière. Comme nous avons parlé des différentes étapes de votre vie, j'aimerais maintenant que tu t'assoies, que tu te détendes, que tu fermes les yeux et que tu penses à ce que tu vois pour le Mara de 2030.
El Mara : Ce que je veux, c'est arriver heureux à mon 30e anniversaire, tu vois ? Me sentir complet, en paix, mon frère. Tu me comprends ? C'est ce que je veux.
Je veux que mes filles puissent voir leur papa et dire "c'est mon papa". C'est mon bonheur. C'est comme ça que je veux atteindre l'âge de 30 ans.
Ali Masare : Tu es une personne plus mûre aujourd'hui, pour qui la famille compte beaucoup. Est-ce que tu as aussi le sentiment que tu ne peux pas les décevoir, et qu'en fin de compte, ce que tu fais, tu le fais pour eux ?
El Mara : Je me sens motivé, je suis motivé. Ma fille me motive. Cela me motive de savoir que le temps passe. Et que si je ne fais pas quelque chose aujourd'hui, ce ne sera pas la même chose plus tard. Cela me motive de savoir que j'ai une longueur d'avance, que je peux continuer à advancer.
Et je m'engage pour demain, en commençant aujourd'hui. Et depuis le jour de la naissance de ma fille, je me suis engagée à aller de l'avant. Ce qui m'intéresse aujourd'hui, c'est qu'elle suive aussi mes traces dans la musique, et que sans chagrin, elle puisse dire "Regarde, c'est mon papa".
Je crois que je me sens aussi redevable vis-à-vis des gens, et je veux dire que c'est une dette que je paye avec cet album.
Ali Marare: À ce propos, que nous réserve El Mara pour 2024 ?
El Mara: Il y a un album à venir qui s'appelle Bajo Penumbra. Cet album libère toutes les dettes que j'ai envers moi-même, envers l'avenir et envers mes fans.
En fait, je me suis ressaisi. Je vais donner aux fans ce qu'ils veulent. Ils veulent une meilleure version d'El Mara et j'y travaille. Je vais donc sortir un album complet pour eux, et c'est ce qu'ils demandent. Ils veulent de la "malandrez", de la folie, et c'est ce que je vais leur donner.
Et puis, je vais régler cette dette avec moi-même, et je vais me voir dans les vidéos avec plaisir maintenant.
Ali Masare: Voilà le Mara que je veux !
El Mara: Ensuite, concernant l'avenir, d'après ce que je t'ai dit à propos de ma fille, demain elle verra le père qu'elle a aujourd'hui. Et celui du passé, son père quand il était jeune. C'est quelque chose dont je me soucie aussi, parce que, comme je l'ai dit, j'ai mes filles et je veux qu'elles voient que c'est ce que je fais, et qu'elles le montrent avec fierté.
Ali Masare : Pour terminer, que dirais-tu aux personnes qui peuvent s'identifier à toi ?
El Mara: Pour faire court, je pense simplement qu'il n'est jamais trop tard. Il est toujours bon de prendre un nouveau départ. Il est toujours bon de repartir à zéro, et que la réussite est une meilleure revanche pour tout le monde. Il n'est pas nécessaire de s'attirer des ennuis.
Je veux vous dire que ce n'est pas la seule chose qui existe. Il y a beaucoup de belles choses sur la planète et dans le monde et rien n'est difficile.
Tous les gens sont égaux, et le fait qu'une personne vienne du bas de la rue avec rien, peut-être de là où je viens, ou pire, et qu'elle aille très loin, c'est admirable.
Alors, donnez tout ce que vous avez, soyez forts, soyez "chingones", soyez des guerriers ; et si vous êtes un homme, encore plus parce que vous avez un engagement dans la vie.
Ali Masare : Mara, merci beaucoup pour ton temps, mon frère, c'est toujours un plaisir de pouvoir parler avec toi.
El Mara: On est au top ici, mon frère !
Le nouvel album d'El Mara, Bajo Penumbra, est sorti et disponible sur votre plateforme de streaming préférée (Spotify, YouTube Music).
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